Le projet de loi retraite décrypté article par article
- Lorenzo Lanteri
- 28 janv. 2020
- 47 min de lecture
Deux projets de loi - organique et ordinaire et des précisions renvoyées à au moins 16 ordonnances : ainsi se présente l’architecture globale de la réforme des retraites. L'avant-projet de loi retraite s’inspire pour une bonne part des propositions issues du rapport « Delevoye ». Le texte de loi comporte plus de 140 pages et plus de 60 articles. C’est un matériau extrêmement technique et complexe parfois peu lisible et lacunaire dont vous trouverez l’analyse ci-dessous.
Article 1. Fondements et objectifs du régime universel
Cet article reprend les grands principes qui fondent le système universel de retraite, ainsi que les six grands objectifs sociaux et économiques qui lui sont assignés (équité, solidarité, garantie d’un niveau de vie satisfaisant aux retraités, soutenabilité économique et d’équilibre financier, lisibilité). Un décret doit définir ces indicateurs. Ces dispositions entreront en vigueur au 1er décembre 2020.
Par ailleurs, le gouvernement s’engage à ce que la mise en place du système universel s’accompagne d’une revalorisation salariale permettant de garantir un même niveau de retraite pour certaines catégories comme les enseignants, les chercheurs. Ces revalorisations s’appliqueront aussi aux maîtres contractuels de l’enseignement privé sous contrat. Cet engagement sera rempli dans le cadre d’une loi de programmation dans le domaine de l’éducation nationale et d’une loi de programmation pluriannuelle de la recherche. Des compensations financières sont effectivement à prévoir pour les enseignants. En effet, le niveau moyen des primes de la fonction publique est de 22 % or le niveau moyen des primes des enseignants est de 9%. La période de transition de 15 ans doit donc s’accompagner d’une politique de revalorisation salariale permettant de garantir le même niveau de retraite pour les enseignants que pour des corps équivalents de la fonction publique. On est en droit de penser que sur la méthode le chantier de la transformation de la rémunération des agents publics aurait dû s’ouvrir préalablement à la présentation de l’avant-projet de loi retraite.
Article 2 à 7. Assurés couverts
Cet article définit le périmètre du régime et les populations d’actifs couvertes. Le système universel de retraite couvre l’ensemble des personnes travaillant en France, sans exception, et se substitue ainsi aux 42 régimes de retraite actuellement existants (régimes de base et régimes complémentaires obligatoires). Il est applicable :
aux assurés relevant du régime général actuel soit l’ensemble des salariés, du privé comme du public (pour les contractuels uniquement) ;
aux travailleurs indépendants. Ces deniers continueront de bénéficier leurs régimes spécifiques pour l’invalidité-décès;
aux salariés et aux exploitants agricoles. L’avant-projet de loi maintien l’affiliation à la MSA Mutualité sociale agricole (MSA) pour ces assurés car la MSA gère également les autres aspects de la protection sociale. En effet, la MSA fait office de guichet unique pour les risques maladie, vieillesse, famille pour les salariés et exploitants agricoles;
aux fonctionnaires, aux magistrats et aux militaires, qui continueront également de bénéficier de leurs régimes propres au titre des autres risques sociaux ne relevant pas de la retraite ;
aux assurés qui relevaient de régimes spéciaux de retraite de la SNCF, de la RATP, des clercs et employés de notaires (CRPCEN), des industries électriques et gazières (Cnieg), de la Banque de France, de l’Opéra national de Paris, de la Comédie-Française, des ouvriers de l’État, des mines, du Port autonome de Strasbourg et des ministres des cultes en Alsace-Moselle soumis au régime concordataire ainsi que les membres du Conseil économique, social et environnemental (Cese). Les régimes spéciaux sont donc bien compris dans le système universel. Cependant, l’application des nouvelles règles de départ se fera de façon plus progressive pour les agents de régimes spéciaux qui bénéficient d’âge d’ouverture des droits anticipés.
Les assurés relevant du régime retraite des marins se verront appliquer les modalités précises de leur intégration dans le système universel de retraite par le biais d'une ordonnance. Les spécificités des métiers maritimes sont donc reconnues dans le système universel. L’Énim (Établissement national des invalides de la Marine) continuera d’exister pour gérer le régime de retraite des marins qui gardera certaines spécificités pour tenir compte de la pénibilité, de la disponibilité, des risques, de l’isolement.
Article 8. Retraite par points
Dans le système universel de retraite, les droits à retraite seront calculés en points. Le droits à retraite seront calculés en points enregistrés sur un compte personnel des assurés. La retraite des assurés se composera de 3 types de points:
Des points acquis au titre de l’activité professionnelle en contrepartie du versement d’une cotisation. Chaque heure travaillée ouvrira des points.
Des points acquis au titre de la solidarité (chômage, maladie, maternité)
Des points attribués en fin de carrière (majoration pour enfants et minimum retraite)
Au moment du départ, les valeurs d’acquisition et de service du point seront déterminées par la caisse nationale de retraite universelle. Le montant de la retraite est donc le résultat du produit du nombre de points inscrits au compte personnel de carrière de l’assuré à la date d’effet de sa retraite par la valeur de service du point à cette date. Le montant de la retraite est aussi fonction de l’âge de l’assuré à la date d’effet de la retraite, le coefficient d’ajustement est appliqué à ce montant.
Si le passage à un système par points parait mieux armé que les annuités pour prendre en compte toute période travaillée aussi minime soit-elle. En revanche, on peut interroger le choix du gouvernement de sortir de la solidarité interne du régime de retraite la quasi-intégralité des dispositifs de solidarité. Pour mémoire, les droits familiaux étaient aujourd’hui servis par le régime de retraite lui-même où la Caisse National d’assurance familiale. En sortant de manière aussi marquée, la gestion et le financement des dispositifs de solidarité, on s’expose à ce que ces derniers soient manipulés annuellement par le biais des lois de financement de la sécurité sociale. On peut légitimement interroger ce choix qui consiste à mettre autant en exergue les dispositifs de solidarité au sein d’un fonds spécifique, le fonds de solidarité Vieillesse universel.
La solidarité nationale ne sera plus cachée à l’intérieur même des rouages interne de la caisse nationale de retraite Universel. Rendre explicitement visible la solidarité peut nuire à sa pérennisation dans la mesure où certains de nos concitoyens cesseraient de vouloir compenser les différences des autres. Un gouvernement serait tenté d’ajuster ces dispositifs à la baisse en cas de retournement économique. Autrement dit, opposer points acquis au titre de l’activité professionnelle et points acquis au titre de la solidarité revient à déchirer toujours un peu plus le voile d’ignorance nécessaire à la cohésion d’une société.
Tant la valeur de service du point que la valeur d’acquisition des points seront déterminées par le Conseil d’administration de la Caisse nationale de retraite universelle. Les partenaires sociaux représentés au sein du conseil d’administration pourront agir sur les paramètres et les leviers de stabilisation du régime. Le gouvernement considère que les partenaires sociaux sont légitimes pour gérer la partie des droits contributifs retraite - acquis au titre de l’activité professionnelle - ces droits étant considérés comme du salaire différé. En revanche, le conseil d’administration n’aura pas directement la main sur les dispositifs de solidarité. L’Etat sera gestionnaire du fonds de solidarité universel vieillesse, ce fonds étant alimenté uniquement par des impôts, taxes et autres transferts venant du budget de l’Etat.
L’Etat pilotera ainsi les points attribués au titre des périodes d'interruptions d’activité (chômage, maladie etc.), les minimas de retraite (minimum de pension, minimum vieillesse) dispositifs de départs anticipés de droit commun (C2P, carrière longue) et les droits familiaux. Les partenaires seront associés de manière subsidiaire sur la partie solidarité du régime de retraite. Ils pourront être consultés sur les modifications des mécanismes de solidarité et siégeront aux Conseil de surveillance du fonds en charge de ces dispositifs. C’est déjà le cas actuellement au sien du Fonds de Solidarité Vieillesse.
Article 9. Valeurs d’achat et de service
La valeur d’acquisition des points et la valeur de service seront déterminées par le Conseil d’administration de la Caisse nationale de retraite Universel (CNRU) en tenant compte des projections financières du système avec pour obligation de ne pas diminuer la part des pensions dans le PIB. Ces valeurs d’acquisitions et de services seront revalorisés au 1er janvier de chaque année. La valeur du point ne pourra pas baisser, cette règle d’or étant inscrite à l’article 55 du projet de loi.
À compter du 1er janvier 2045, les valeurs d’acquisition et de service seront fixées par défaut en fonction de l’évolution annuelle du revenu moyen par tête constatée par l’Insee - et non plus l’inflation comme aujourd’hui, sauf si une délibération du conseil d’administration de la caisse nationale de retraite universelle approuvée par décret ou un décret déterminent un taux différent.
De 2022 à 2024, les taux d’évolution de la valeur d’acquisition et la valeur de service du point seront fixés, par une délibération du conseil d’administration de la caisse nationale de retraite universelle, approuvée par décret ou à défaut fixée par décret à un niveau compris entre l’évolution annuelle des prix hors tabacs et l’évolution annuelle du revenu moyen par têtes.
la valeur d’acquisition et la valeur de service du point applicables au titre de l’année 2022 sont fixées, avant le 30 juin 2021, par une délibération du conseil d’administration de la caisse nationale de retraite universelle approuvée par décret, ou à défaut par un décret.
Le passage à une indexation sur les salaires présente indéniablement de nombreux avantages. Ce mode d’indexation évite que les droits à retraite constitués en début ou en milieu de carrière ne perdent de la valeur relativement à l’évolution des salaires au moment de partir en retraite. Les valeurs d’acquisition et de service seront donc fixées en fonction de l’évolution annuelle du revenu moyen par tête constatée par l’INSEE. Ce mode d’indexation garantit une certaine équité intergénérationnelle en rendant le montant de pension indépendant des déséquilibres démographiques transitoires (déficit de court-terme).
En revanche, on peut sérieusement s’interroger sur la longueur de la période transitoire (2024 - 2045), cela revient à repousser aux calendes grecques ce mode d’indexation plus favorable aux assurés. On peut aussi interroger la lisibilité des droits avec cette phase transitoire de 20 ans où les droits sont calculés sur une indexation pondérant inflation et salaires. Le poids des salaires étant progressivement croissant. Il aurait été plus opportun de maintenir l’indexation sur l’inflation pour les droits passés et d’opter directement à une indexation sur les salaires pour les droits nouveaux.
Article 10. âge d’équilibre du taux plein
Cet article constitue le nœud gordien de la réforme puisqu'il introduit du paramétrique (une relèvement de l’âge de départ à la retraite) dans un réforme qui se voulait uniquement systémique.
Le système universel de retraite fonctionnera bien autour d’un âge d’équilibre, autour duquel s’articulera une décote et une surcote. L’âge d’équilibre est fixé, avant le 30 juin 2021, par une délibération du conseil d’administration de la caisse nationale de retraite universelle, en référence à l’âge moyen de départ à la retraite des salariés du régime général hors départs anticipés constatés par le comité d’expertise indépendant. À défaut il sera fixé par décret et évoluera à hauteur des deux tiers de l’évolution des prévisions d’espérance de vie à la retraite des assurés.
Les montants de la décote et de la surcote seront fonction de la différence, exprimée en mois, entre l’âge de l’assuré à sa date de départ à la retraite et l’âge d’équilibre applicable à sa génération. La décote viendra baisser la pension de l’assuré qui prend sa retraite avant l’âge d’équilibre et augmentera celle de l’assuré qui prend sa retraite après cet âge. La valeur par mois de ces décotes et surcotes seront fixées par décret. À défaut, lors de l’entrée en application du système universel de retraite, ils seront fixés par décret à 5 % par an comme les actuels taux de décote et surcote.
Cet “âge d’équilibre” est supposé se substituer au mécanisme faisant intervenir la durée d’assurance dans le système actuel. Certains relèveront pourtant qu’un système en point peut aisément se passer d’une seconde borne d’âge pour les paramètres de liquidation. Plusieurs dérogations (pénibilités, invalidités, handicap) sont prévues à cet âge d’équilibre pour atténuer la mesure. Ces dérogations sont encore insuffisantes car un système de retraite équitable passe par des âges différenciés en fonction des carrières et des trajectoires de vie. Par ailleurs, on peut s’interroger sur la dimension inégalitaire d’un tel système dans la mesure où les assurés les plus favorisés et les mieux à mêmes de poursuivre leur activité bénéficieront alors à la fois d’un nombre de points élevé et d’une majoration importante, tandis que les assurés les moins favorisés seraient pénalisés à la fois par un nombre de points réduit et par une minoration importante.
Bien que très controversée, cette mesure d’âge bénéficiera à une partie des personnes ayant des carrières très hachées. En effet, elle permettra aux assurés en situation de précarité, qui n’ont pas réalisé une carrière complète d’éviter, contrairement à aujourd’hui, d’attendre l’âge d'annulation de la décoté (67 ans) pour liquider leur retraite à taux plein faute d’avoir tous leurs trimestres. Selon la Drees, 19% des femmes de la génération née en 1950 sont parties en retraite à l’âge d’annulation de la décote en 2017.
Le conseil d’administration (article. 49) où siégeront les partenaires sociaux disposeront des leviers nécessaires à la définition des modalités liées à cet âge et aux minorations/majorations prévues. Le conseil d’administration agira dans un cadre financier très contraint pour fixer l'âge d’équilibre et les décotes/surcotes. Il devra respecter une règle d’or de pilotage financier lorsqu’il fixe les paramètres. Le solde glissant du système universel devra être au moins à l’équilibre sur 5 ans tout en respectant une trajectoire d’équilibre sur 40 années. Faute de quoi, l’Etat reprendra la main en fixant l’âge et le niveau de décote par décret.
Article 11. Indexation des pensions
Les pensions seront indexées sur l’inflation*.Elles subiront donc une revalorisation identique à celle des prix à la consommation. Le conseil d’administration de la caisse nationale de retraite universelle pourront décider d’une revalorisation différente dans le but de respecter la trajectoire d’équilibre du régime (sous entendu revalorisation inférieure).
A l’heure actuelle les pensions de retraite sont indexées sur l’inflation. si cette valeur est négative les pensions sont “gelées”. Elles ne peuvent pas se voir appliquer une minoration donc elles ne peuvent baisser. (article L 161-25 du code de la sécurité sociale). Tel que rédigé, cet article reconduit le même principe. Il laisse néanmoins la possibilité au conseil d’administration de la caisse nationale de déroger à ce principe et de prévoir l’application d’un coefficient de revalorisation différent dans le respect de la trajectoire d’équilibre qu’elle a la possibilité de fixer elle même. Cette dérogation doit néanmoins respecter la garantie que les pensions ne baissent pas.
Il est à noter que le projet de loi ne choisit pas la règle d’indexation des pensions la plus généreuse. Beaucoup des futurs retraités auraient trouvé un intérêt à ce que les pensions soient indexées sur les salaires plutôt que sur l’inflation (évolution des prix). Dans une société du grand âgé où vont se multiplier les situations de dépendances et la nécessité de recourir à des services à la personne il faut faire en sortes que le niveau de vie des retraités ne décroche pas de celui des salariés.
Article 12. Relations avec les assurés et révision des pensions
Cet article prévoit la création d’un compte personnel de carrière pour retracer l’intégralité des droits acquis des assurés dans le système universel. Une seule pension sera versée à chaque assuré au moment de son départ en retraite. Chaque assuré aura accès, à tout moment, à l’intégralité des droits inscrits dans son compte. L’exposé des motifs mentionne que « l’assuré pourra disposer à tout moment d’une estimation du montant de sa retraite en fonction de différentes hypothèses d’évolution de carrière ».
La liquidation unique des retraites est déjà quasiment effective via la Liquidation unique des régimes alignés (LURA). Le projet de loi n’apporte rien de nouveau dans ce domaine. Le GIP info-retraite a déjà beaucoup avancé dans le domaine de l’information en ligne pour les assurés. Ce dernier sera d’ailleurs pleinement intégré dans la Caisse nationale de retraite nationale Universelle (CNRU) on est donc davantage dans une continuité de l’existant qu’une véritable création de services comme le laisse supposé l’exposé des motifs.
Article 13. Cotisations au régime universel
Les cotisations pour le calcul des droits à retraite seront calculées dans la limite de 3 du plafond annuel de sécurité sociale (Pass). Un décret va venir fixer le niveau total des taux de cotisation de retraite à 28,12 % (60 % pour les employeurs et à 40 % pour les assurés).
Ce niveau total correspondra à deux cotisations s’appliquant à deux assiettes distinctes :
Une cotisation plafonnée à 25,31 % (soit 90 % des 28,12 %) s’appliquera jusqu’à 3 fois le plafond annuel de la sécurité sociale (soit environ 120 000 €). En cas de poly-activité, cette cotisation plafonnée sera proratisée en fonction de la quotité de travail réalisée auprès de chaque employeur. C’est à partir des montants de cotisations plafonnées dues annuellement que seront calculés les droits à retraite accordés aux assurés au titre de leur activité professionnelle. Pour la comptabilisation des droits, ne seront ainsi pas prises en compte un certain nombre de réductions et déductions de cotisations, donnant lieu à une compensation par l’État.
Une cotisation déplafonnée de 2,81 % (soit 10 % des 28,12 %), s’appliquera au-delà des 3 PASS sur la totalité des rémunérations perçues sans limitation de niveau.
Avec l’instauration de cette cotisation déplafonnée chacun est amené à participer au financement de du système universel de retraite mais les plus haut revenus participeront davantage puisqu’ils cotiseront sur la totalité de leurs revenus (donc au-delà des 3 PASS) Les sommes récoltées serviront à financer des dispositifs de solidarité (dont une grande partie sera pourtant assuré par l’impôt via le Fonds de Solidarité vieillesse universel) ou l’équilibre général du régime.
Les personnes ayant aux très hauts revenus ont tendanciellement une forte espérance de vie que la moyenne ce qui alourdit les charges pour le régime de retraite.Ce plafond de sécurité sociale garantit un haut niveau de répartition car il englobe les rémunérations allant jusqu’à 120 000 euros annuels (soit 3 PASS). Beaucoup ont ergoté sur le choix de ce niveau de plafond (3 PASS). Pour certains, la suppression des cotisations au-delà de 120 000 euros va préfigurer l’avènement d’un étage de retraite par capitalisation. Le fait de limiter le régime universel à 3 PASS témoigne en fait d'une réalité plus prosaïque : l’équilibre financier du système de retraite universel. En effet, faire cotiser les très haut-revenus au sein d'un régime universel apporte certes un surplus de cotisation mais à long-terme cela se traduit par des dépenses importantes du fait des pensions élevées que le régime est tenu de servir. En outre, les personnes ayant aux très hauts revenus ont tendanciellement une forte espérance de vie que la moyenne ce qui alourdit les charges pour le régime de retraite.
Cotiser jusqu'à 8 fois le plafond de la Sécurité sociale au sein d’un régime obligatoire par répartition comme le font les cadres aujourd'hui à l'Agirc-Arrco était une singularité française. Cette exception française est d'ailleurs relativement récente. La retraite complémentaire des cadres du privé se cantonnait à 4 fois le plafond de la Sécurité sociale, jusqu'à ce que les partenaires sociaux décident en 1989 de doubler ce seuil afin de faire rentrer des cotisations, pour remettre les comptes à l'équilibre sans en tirer les conséquences sur le long-termes.
Toujours est-il qu’il faudra honorer ces droits et que la marche arrière de 8 plafonds à 3 plafonds ne constituera pas une manoeuvre vraiment aisée. Après avoir procuré des recettes conséquentes au régime complémentaire, cette tranche va coûter très cher à éteindre. Au total, ce passage à 3 PASS constituerait une perte annuelle de 4,2 milliards d’euros en moyenne sur la période 2025-2040 soit 63 milliards d'euros.... 55,5 milliards d’euros si l’on tient compte de la cotisation déplafonnée de 2,81% (cotisation non génératrice de droits dont s’acquitteront les cadres dans le système universel de retraite.
Le projet de loi renvoie à une ordonnance pour organiser sur une période de vingt ans le passage des cotisations de 3 à 8 plafonds de sécurités sociales; Beaucoup de flou demeure donc sur qui s’acquittera réellement de la facture? Les participants de l’AGIRC ARRCO via les réserves (60 milliards d’euros) qu’ils ont constituées depuis toutes ces années ? Les nouveaux assurés du régime universel? Les cadres aux hauts-revenus via une contribution temporaire non génératrice de droits supplémentaires ? Les finances publiques de l’Etat et de la sécurité sociale via un nouveau dispositif d'éxonerations de cotisations sociales sur les produits d’épargne supplémentaires ?
Article 14. Proratisation plafond de sécurité sociale pour les salariés
Cet article fixe les règles de proratisation du plafond de la sécurité sociale pour certains cas d’activités partielles. La mesure prend effet au 1er janvier 2025. Depuis 2018, la proratisation du plafond mensuel servant de base au calcul de certaines cotisations plafonnées a été étendue aux absences non rémunérées (en plus du travail à temps partiel notamment). Cet article reconduit ce principe et n’appelle pas de commentaires d’autant que son effet sera limité par l’effet de la fixation à trois plafonds.
Article 15. Passage d’une assiette de 8 PASS à 3 PASS pour les salariés et employeurs du secteur privé
L’avant-projet de loi prévoit une période transitoire de 20 ans pour la convergence des assiettes des régimes de bases et complémentaires qui sera précisée par ordonnance. Si l'idée est bien celle d'une convergence des taux de cotisations unique celle-ci devra être conduite de façon progressive pour ne pas changer les règles de façon brutale dans les régimes où les règles sont les plus éloignées de celles qui seront fixées dans le régime universel. Cette ordonnance pourra également modifier les règles d’assujettissement à cotisations et contributions sociales ainsi qu’à l’impôt des versements des salariés et de leurs employeurs dans le cadre de dispositifs de retraite supplémentaire en compensation des moindres cotisations acquittées sur la part de rémunération comprise entre 3 et 8 PASS dans le système universel de retraite. Cette disposition vise à poser les jalons d'une solution d'épargne retraite supplémentaire pour les hauts cadres qui perdent le bénéfice d'une cotisation à 8 PASS du fait du passage au système universel limité à 3 PASS. Des exonérations fiscales et sociales sont donc à prévoir. Les assurés concernés sont notamment :
des salariés concernés par des dispositions conventionnelles ou contractuelles les autorisant à cotiser obligatoirement à des taux plus élevés que le taux normal, ou prévoyant, en matière de retraite complémentaire, une répartition des cotisations entre employeurs et salariés différente de celle s’appliquant dans le droit commun ;
des contractuels du secteur public ayant un taux de cotisations actuellement plus faible que les salariés du privé, compte tenu de différences entre les régimes de retraite complémentaire (entre l’Ircantec et l’Agirc-Arrco) ;
des cotisations dues aux régimes complémentaires jusqu’à des niveaux de revenus plus élevés que dans le Système de retraite universel (8 PASS au lieu de 3).
Tel que rédigé, cet article ne prévoit pas que les réserves constituées par les différents régimes soient préemptées pour financer des droits supplémentaires pour les plus hauts-revenus. Par ailleurs, cette disposition ouvre clairement la voie à des dérogations possibles au taux de cotisations prévu dans le Système universel de retraite Il est bien sûr question de conditions et de limites mais on ouvre déjà une brèche pour rassurer certains régimes.
Article 16 : Réductions de taux de cotisations vieillesse
Les réductions accordées pour certaines populations affiliées au régime général (artistes du spectacle, mannequins, journalistes et professions médicales exerçant à temps partiel pour le compte de plusieurs employeurs) sont maintenues et prises en charge sur le budget de l’État.
L’Etat sera donc amené à compenser le différentiel de cotisations dévolues au régime universel. La logique du texte est compréhensible pour certaines professions relevant de ces catégories (artistes aux faibles revenus, intermittents, pigistes…). Toutefois, la prise en charge par l’Etat ainsi prévue à cet article ne distingue pas, au sein de ces populations, les différents niveaux de revenus. Pour maintenir une certaine équité, il faudrait que la prise en charge par l’Etat de points soit limitée à un certain plafond (artistes-auteurs aux hauts revenus).
Article 17. Intégration primes pour les droits retraite fonctionnaires, magistrats et militaires
Les primes des agents publics seront soumises à cotisation. Pour les agents travaillant à temps partiel, sera maintenue la possibilité pour l’assuré de demander à cotiser sur une assiette de cotisation à hauteur de l’équivalent du temps plein.
La réforme a mis en lumière le problème des rémunérations et des déroulements de carrière dans les fonctions publiques. Le système actuel repose sur l’acceptation d’un salaire bas, en particulier en début de carrière en échange d’une retraite plus élevée. L’intégration des primes ne suffira pas à compenser les effets de la réforme car tout le monde n’en perçoit pas. Il n’y aura donc pas de d’acceptation possible de cette réforme sans révision des politiques salariales dans la fonction publique. Si on modifie le contrat initial sur la retraite, il faut modifier le contrat salarial avec un déroulement de carrière et des rémunérations plus élevées dès le début de carrière.
Article 18. Intégration primes pour les droits retraite pour les fonctionnaires de la fonction publique d’Etat, de la fonction publique hospitalière et de la fonction publique territoriale.
Cet article prévoit que l’intégralité de la rémunération (primes comprises) des fonctionnaires précédemment cités soit prise en compte pour l’ouverture de leurs droits retraite. Le barème de cotisations de droit commun s’appliquera sur les primes en sus du traitement, et les droits seront calculés dans les mêmes conditions que pour les salariés du privé. L’article ouvre également la possibilité aux agents travaillant à temps partiel de cotiser à hauteur d’un équivalent temps plein, pour acquérir davantage de points. La question qui demeure est de savoir si cette prise en charge d’une partie des cotisations s’effectuera via la solidarité interne au régime (cotisation déplafonnée) ?
Toujours est qu’une ordonnance définira les modalités de convergence du régime de cotisation de ces fonctionnaires vers le système cible, dans le cadre d’une période de transition qui ne pourra excéder quinze an
Article 19. Convergence régimes spéciaux
Cette affiliation se fera au terme d’une transition longue qui ne pourra excéder 20 ans. Le Gouvernement est habilité à en définir les modalités au terme du délai ci-avant. Il était en effet impossible de passer brutalement au système universel sans tenir compte de l’éclatement actuel du système de retraites, notamment des régimes spéciaux.
Par ailleurs, le nombre de salariés couverts par ces derniers justifie l’existence d’une période transitoire, laquelle permettra une bascule progressive vers le système universel, tout en tenant compte des droits déjà acquis, de ceux à venir durant la période de transition et ceux à venir une fois le système universel en place.
Article 20. Barème de cotisation indépendants
L’article prévoit que les indépendants cotiseront comme les salariés (soit a priori 28,12 %) jusqu’à un PASS (près de 40 000 €) ; entre 1 et 3 fois PASS (de 40 000 € à 120 000 €), leur taux de cotisation sera l’équivalent de la part salariale des salariés (10,19 points) avec une cotisation déplafonnée (2,81 points de solidarité). La prise en charge par l’assurance maladie d’une partie des cotisations retraite dues par les praticiens et auxiliaires médicaux conventionnées (ASV et PCV) est maintenue.
Il était nécessaire que barème de cotisation des indépendants soit adapté dans la mesure où les cotisations sont acquittées personnellement et non sous forme partagée entre un salarié et un employeur. Le niveau de cotisation des non-salariés sera donc identique à celui des autres assurés (28,12 %) jusqu’à 1 PASS.
Ce système permettra de sécuriser la retraite d’une grande partie d’indépendants (notamment artisans, commerçants et exploitants agricoles) qui dans l’ancien système ne dégageaient pas assez de chiffre d’affaire - qui sert de base à leurs cotisations - pour financer leurs retraites. Le projet de loi prévoit aussi mettre progressivement fin aux disparités actuelles en termes d’efforts contributifs entre les activités indépendantes (professions libérales et autres statuts : artisans, commerçants et exploitants agricoles). Cette partie de l’article s’inspire grandement des travaux du haut conseil du financement de la protection sociale (HCFPS) sur l’amélioration de la protection sociale des travailleurs non-salariés (2016).
Les indépendants vont également s’acquitter de la cotisation déplafonnée de 2,81% à compter du 1er euros. Cette solidarité peut se justifier d’autant plus que des dispositifs d’aides au paiement de cotisations sociales - déjà existantes au titre de l’action sociale dévolue aux indépendants - seront maintenus dans le Système universel.
Malgré un effort de convergence, le projet de texte comporte tout de même de nombreuses dérogations professionnelles qui pourraient "nuancer" le caractère universel de la réforme (maintien d’une prise en charge partielle des cotisations vieillesse, par l’assurance maladie, des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés etc.). Une imprécision demeure sur les mécanismes de financement de la solidarité des indépendants et sur la compensation d'abattements envisagés sur les assiettes de cotisations des indépendants.
Article 21. Unification et simplification assiette de cotisation indépendants
L’assiette de cotisations et les contributions de l’ensemble des travailleurs indépendants seront définies comme l’équivalent d’une assiette brute qui serait calculée à partir d’un abattement forfaitaire appliqué au revenu déclaré. Le gouvernement pourra prendre sur ordonnance des dispositions pour faire converger en 15 ans à partir de 2025 les taux actuels des régimes des professions libérales et pour réduire l’assiette de la CSG des non-salariés. L’objectif est de faire en sorte que le rapport entre l’assiette des prélèvements applicables aux travailleurs indépendants et les revenus qu’ils perçoivent effectivement soit proche de celui des salariés.
Ce calcul n’est pas applicable aux autoentrepreneurs. Par conséquent, les travailleurs indépendants exploitant une activité sous ce statut ne devraient pas être concernés (ils continueront de s’acquitter d’une cotisation forfaitaire libératoire assise sur leur chiffre d’affaire.
Cette approche semble plus simple en terme de déclaration et de calcul, toutefois, il conviendrait de connaître le différentiel de produit entre une CSG assise sur des assiettes plus réduites mais plus nombreuses, et celui d’une CSG assise sur une unique assiette mais bien plus large. Pour les cotisations retraites plafonnées et déplafonnées cela aura peu d’effets. En revanche on peut d’ores et déjà) prédire que l’effort contributif des professions libérales sera plus important.
Article 22. Cotisation minimale indépendants
L’article précise que les cotisations d’assurance vieillesse des travailleurs indépendants ne pourront pas être inférieures à un montant fixé par décret. Pour rappel, dans le système actuel, quand le revenu qui sert de base au calcul des cotisations est inférieur à un certain seuil, il est porté à une assiette minimale. Cette assiette minimale permet de valider trois trimestres par an. Le tetxe prévoit que la cotisation minimale qui sera fixée par décret pourra être plus importante afin de permettre aux assurés concernés de valider plus de droits. Les travailleurs indépendants qui seront concernés par le système universel en points pourront demander à cotiser sur une assiette supérieure.
Les non-salariés agricoles qui seront concernés par le système universel en points seront soumis à une cotisation minimale qui ne pourra être inférieure à celle qui permettrait d’obtenir un nombre de points équivalent à ceux obtenus en cotisant sur l’assiette plafonnée des salariés (1 Pass).
Pour les micro-entrepreneurs dont le régime simplifié les conduit à cotiser de façon strictement proportionnelle à leur chiffre d’affaires, une option pour le paiement d’une cotisation minimale sera proposée pour renforcer leur couverture retraiteEnfin
Article 23. âge d’ouverture des droits
L’âge légal de départ est fixé à 62 ans comme dans le système actuel. Cependant, nous verrons à la lecture des articles suivants qu’un nombre important de dispositif s’articule autour de l’âge du taux plein qui sera fixé à 64 ans en 2027. En matière de cumul-emploi retraite, de minimum de pension et même de carrières longues. Par conséquent, même si un assuré pourra toujours partir à 62 ans, plusieurs droits lui seront fermés. Cela revient à modifier les droits et à peser sur les choix. Tous ces éléments contribuent à rendre fictif cet âge d’ouverture des droits à 62 ans.
Article 24 et 26. Cumul emploi-retraite
Ces deux articles prévoit dans le cadre du cumul emploi-retraite, il sera désormais possible d’acquérir de nouveaux points, et ce dès 2022, si les conditions d’âge et de durée d’assurance sont remplies. A partir de 2025, l’âge du taux plein se substitue à l’âge du taux plein (pour la génération née après 1975). Ces nouvelles dispositions sont articulées avec le droit du travail : l’âge à partir duquel l’employeur peut se séparer d’un salarié demeurera fixé à 67 ans avec son accord et à 70 ans sans son accord. Les conditions de plafond et de respect d’un délai de six mois pour la reprise d’une activité chez le dernier employeur dans le cas d’un cumul plafonné sont maintenues.
Le texte apporte un changement notable puisque les règles du cumul emploi retraite actuelles ne permettaient pas de se constituer des droits à retraite lors de la reprise d’activité. Toutefois, le cumul emploi-retraite n’est pas entièrement libéralisé puisque celui-ci demeura plafonné et soumis à un délai de carence de 6 mois. On peut également interroger plus profondément cet article avec la philosophie que prétend incarner l’avant-projet de loi retraite. Dans un système où l’on garantit le libre choix de l’assuré, ce dernier pourrait toucher sa retraite dès 62 ans et éventuellement poursuivre une activité professionnelle. Or une fois encore c’est bien l’âge d’équilibre qui est retenu pour point de départ d’accès à ce dispositif.
Article 25. Amélioration retraite progressive
La retraite progressive, instaurée en 1988, est un dispositif permettant d’aménager la transition entre vie active et retraite. Les assurés peuvent ainsi travailler à temps partiel tout en bénéficiant d’une partie de leur retraite. Il s’agit de l’un des trois dispositifs de prolongation d’activité mis en avant par la réforme des retraites de 2003 avec la surcote et le cumul emploi-retraite. L’article prévoit que la retraite progressive soit étendue aux salariés au forfait jour et aux professions libérales et ce dès 2022. Le dispositif actuel vise uniquement les salariés à temps partiel au sens de l’article L. 3123-1 du code du travail, c’est-à-dire les salariés dont la durée de travail est décomptée en heures, ce qui exclut de fait les salariés au forfait-jours et les professions libérales.
Autre nouveautés : les employeurs privés ne pourront plus désormais refuser le temps partiel à leurs salariés ouvrant droit à la retraite progressive que si cette quotité réduite de travail est incompatible avec l’activité économique de l’entreprise. On est en droit d’estimer que le motif de refus par l’entreprise demeure trop large et risque de rendre ce droit inefficient.
Le projet de loi indique que les assurés en retraite progressive continueront de bénéficier d’une liquidation complète de leur retraite lors de leur cessation définitive d’activité, sans prise en compte de la fraction de retraite qu’ils ont perçue pour le calcul de la décote ou de la surcote. C’est une proposition intéressante car elle peut permettre à certains assurés d’éviter l’effets couperet de l’âge d’équilibre sans pour autant subir une baisse de pension.
Enfin, le projet de loi met fin à la condition de durée d’assurance mais cette condition est substituée par l’atteinte de légal (62 ans) alors qu’auparavant la retraite progressive était ouverte 2 ans avant l’âge légal (dès 60 ans). Ce relèvement de 2 ans s’avérera pénalisant et atténue passablement la démocratisation du système souhaitée. C’est dès 60 ans que les assurés aux tâches les plus éprouvantes souhaitent avoir une réduction de leur activité et non pas à l’extrême fin de leur vie active.
Article 27. Versements volontaires de cotisations et rachats de points
L’article prévoit une possibilité d’affiliation volontaire au système de retraite universel, sous réserve de ne pas y être affilié à titre obligatoire et de ne pas pouvoir prétendre, en raison de l’âge, à une retraite est créée pour les personnes résidant en France de manière stable et régulière depuis plus de cinq ans, à l’exclusion de certaines personnes (membres du personnel diplomatique et consulaire en poste en France, personnes venues en France pour suivre un traitement médical ou une cure, travailleurs détachés temporairement en France, etc.). Un décret définira les conditions et limites de ces dispositifs.
Cet article définit aussi les conditions d’achat de points qui seront précisées par décret. Il correspond au dispositif actuel de rachat de trimestres au titre de certaines périodes. Les périodes d’aide familiale agricole accomplies après l’âge de fin de scolarité obligatoire et avant l’âge légal d’affiliation au régime d’assurance vieillesse des non-salariés agricoles peuvent faire l’objet d’une validation de droits, en contrepartie d’un versement de cotisations dans des conditions fixées par décret.
Les travailleurs salariés ainsi que les fonctionnaires exerçant un emploi à temps partiel pourront cotiser sur la base de ce que serait leur rémunération à temps plein. Par parallélisme, les travailleurs indépendants bénéficieront également d’un dispositif de surcotisation adapté à leurs spécificités. En cas de baisse de revenus par rapport à l’année précédente, ils pourront ainsi maintenir leur assiette de cotisations à la hauteur d’un montant fixé par décret.
Article 28. Carrières longues
Les assurés pourront partir à la retraite dès 60 ans sous réserve de justifier d’une durée d’activité, fixée par décret, accomplie avant l’âge de 20 ans (condition de début d’activité) et d’une durée d’activité de 516 mois cotisés (pour les assurés nés à partir du 1er janvier 1975) qui sera calculée selon les modalités prévues pour le minimum retraite. Pour le calcul de la retraite anticipée, l’âge d’équilibre sera abaissé à 62 ans au lieu de 64 ans pour le calcul. Toutefois le montant de la retraite ne pourra être majoré par application du coefficient d’ajustement qu’au-delà de l’âge d’équilibre, soit 64 ans.
Autrement dit : si le dispositif carrières longues est maintenu les assurés qui souhaitent bénéficier d’un départ 60 ans subiront désormais une décote. Le calcul du montant de leur retraite se fera sur la base de l’âge d’équilibre abaissé de deux ans. Par conséquent dans l’hypothèse d’un âge d’équilibre fixé à 64 ans, ces assurés subiront une minoration de pension s’ils partent entre 60 et 62 ans. Pire, ces assurés ne pourront surcoter qu’à partir de 64 ans.
Article 29. Départ anticipé pour handicap
Le présent article maintient la possibilité d’un départ en retraite avant l’âge légal fixée par décret (entre 55 et 59 ans). La seule condition est liée à une durée d’activité en situation de handicap et à un taux d’incapacité requis fixé à 50 %. L’exigence d’une seule condition devrait permettre à beaucoup plus de personnes handicapées de faire valoir leurs droits à une retraite anticipée pour handicap. Actuellement, pour partir à la retraite à 55 ans, il faut avoir travaillé en étant handicapé pendant 27 ou 28 ans. De plus, une personne handicapée ayant passé plus de 5 années (soit 21 trimestres) au chômage ou en maladie (périodes assimilées mais non cotisées) ne pourra donc pas prétendre à une retraite anticipée même si elle remplit les deux autres conditions. Pas étonnant que, depuis 2015, le nombre de personnes bénéficiant de ce dispositif stagne à moins de 3 000 euros par an. Afin de prendre en compte l’incidence du handicap sur la vie professionnelle, un nombre de points supplémentaires égal à une fraction des points cotisés sera attribué aux assurés remplissant les conditions d’ouverture de droit pour la retraite anticipée au titre du handicap, dans des conditions et des limites fixées par décret.
Un décret doit fixer la durée d’activité accomplie en situation qui conditionnera l’âge de départ. Les conditions fixées devront prendre en compte la réalité vécue par les travailleurs handicapés (taux de chômage deux fois supérieur à la moyenne nationale, restrictions importantes, niveau de formation peu élevé …) et diminuer la durée de cotisation exigée.
Article 30. Inaptitude
Les personnes inaptes ou en incapacité de travail pourront partir en retraite à l’âge légal de départ, l’âge d’équilibre étant pour eux abaissé au niveau de leur âge de départ. Le projet de loi maintient donc un départ à 62 ans et précise que ce départ se fera à taux plein. L’esprit du dispositif actuel est maintenu. L’objectif étant que ces assurés ne se maintiennent pas dans l’emploi coûte que coûte au risque de basculer à la charge de l’assurance maladie parce que le maintien normal dans l’emploi est impossible
Ces règles s’appliqueront aussi par défaut aux titulaires de pensions d’invalidité, aux bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (taux d’incapacité de 50 % à 80 %) et de la carte mobilité inclusion. Le projet de loi maintient un départ à 62 ans et précise que ce départ se fera à taux plein.
Article 31. Régime d’invalidité pour la fonction publique
Le présent article habilite le gouvernement à procéder par ordonnance à la mise en place, pour la fonction publique, de nouveaux régimes d’assurance invalidité professionnelle et non professionnelle, conduisant à l’acquisition des droits à retraite au titre des périodes d’interruption d’activité. Le cas échéant, cette ordonnance permettrait de modifier les autres dispositifs de congé, de disponibilité et d’indemnisation pour raison de santé.
Sur le fonds, il n’y a pas de raison que les règles relatives à la prise en compte de l’invalidité et de l’inaptitude dans la fonction publique (d’Etat, territoriale ou hospitalière) diffèrent sensiblement du traitement accordé aux salariés du secteur privé notamment dans la possibilité qui leur est donnée de percevoir une pension de retraite pour invalidité. En revanche, une attention particulières devra être accordée à la préparation et au contenu la future ordonnance qui pourra “prévoir la révision des autres dispositifs de congés, de disponibilité et d’indemnisation pour raison de santé”
Article 32. Incapacité permanente
La retraite pour incapacité permanente permet actuellement, dès lors que le taux d’incapacités permanente dépasse 10 % de liquider sa retraite à 60 ans sans décote. Pour les assurés des régimes spéciaux, un décret précisera les modalités d’application de ces conditions d’accès au dispositif dans le cas où les règles qui leur sont applicables ne renverraient pas aux règles régissant la couverture accidents du travail – maladies professionnelles du régime général et des régimes agricoles.
Article 33. Pénibilité
Le Compte professionnel de prévention est étendu aux agents publics et régimes spéciaux (sauf les marins et les militaires). Le mécanisme de plafonnement des points à 100 points est supprimé. C’est une petit avancée, la suppression du mécanisme de plafonnement pourra permettre de cumuler des points sans limitation et donc d’ouvrir plus de droits qu’à l’heure actuelle. Les seuils ouvrant droit au C2P seront abaissés par décret - il s’agira de faire passer le seuil du travail de nuit de 120 à 110 nuits, et celui des équipes successives de 50 à 30 nuits. Le dispositif continuera de permettre un départ en retraite au plus tôt à compter de 60 ans en fonction du nombre de points affectés, avec une diminution à due proportion de l’âge d’équilibre.
L’harmonisation du C2P et son extension à tous les travailleurs alors qu’il était aujourd’hui réservé aux salariés du régime général et du régime agricole constituait l’un des arguments phares du gouvernement pour mettre fin aux iniquités de traitements entre les différents régimes. S’il est inconcevable de traiter différemment des travailleurs en fonction de leurs statuts, on peut noter un manque de réflexion sur la reconnaissance des maladies professionnelles pour les fonctionnaires.
Par ailleurs, c’est un C2P amputé de 4 facteurs de pénibilités (notamment port de charges lourdes) qui va s’étendre à la fonction publique. En effet, les ordonnances travail de 2017 ont sortis du C2P, les facteurs pénibilités : port de charges lourdes, vibrations mécaniques, postures pénibles. Certains seuils ouvrant droit au C2P ont certes été abaissés par décret, afin que davantage d’assurés puissent en bénéficier mais c’est cela demeure nettement insuffisant comparé à la réintégration des 4 facteurs.
Article 34. Gestion du C2P et de l’incapacité
L’élargissement du périmètre de la retraite pour incapacité permanente et du compte professionnel de prévention à l’ensemble des salariés et des agents publics civils conduit à revoir les modalités de gestion et de financement de ces dispositifs en tenant compte, notamment, de l’absence de couverture accidents du travail – maladies professionnelles spécifique dans certains régimes.
Cet article habilite le Gouvernement à définir par voie d’ordonnance les nouvelles règles applicables s’agissant de la gestion de la retraite pour incapacité permanente et du compte professionnel de prévention, qui devra être commune à l’ensemble des assurés, et du financement par l’employeur de ces dispositifs.
Le C2P est aujourd’hui financé sur les excédents de la branche ATMP et plus directement sur des cotisations employeurs. Les fonctionnaires ne sont pas couverts par la branche, dès lors, il n’existe pour l’instant aucun financement de leur pénibilité.
Article 35. Travailleurs de l’amiante (ATA)
De par sa rédaction l’article 35, conserve à l’identique les conditions d’accès à ce dispositif, qui permet aux assurés ayant été en contact avec de l'amiante au cours de leur carrière professionnelle de bénéficier d'une préretraite. Les conditions de calcul et de versement de l’allocation demeurent également inchangées. L’allocation cessera d’être versée lorsque l’assuré âgé d’au moins 60 ans justifiera d’une durée au moins égale à 516 mois pour la génération 1975 (cette durée évoluera comme l’âge d’équilibre) ; au plus tard, à l’âge d’équilibre.
Article 36. Maintien des départs anticipés pour certaines fonctions régalienne
Seuls les fonctionnaires qui exercent des fonctions dangereuses dans le cadre de leurs missions régaliennes conserveront le principe d'un départ avant 62 ans. Sont donc concernés par le présent article les fonctionnaires qui concourent à des missions publiques de sécurité, de surveillance douanière ou pénitentiaire ou de contrôle aérien qui exercent des missions comportant une dangerosité particulière, pendant une durée fixée par décret, pourront partir à la retraite à partir de 52 ans lorsque la limite d’âge afférente à leur emploi est inférieure à 62 ans ou à partir de 57 ans lorsqu’elle est égale à cet âge. Pour le calcul de la retraite de ces fonctionnaires, l’âge d’équilibre sera également abaissé par décret.
Les employeurs de ces fonctionnaires seront redevables d’une cotisation supplémentaire afin de financer le coût, pour le système universel de retraite, des départs anticipés de ces agents.
Pour les militaires, le droit à la retraite sera ouvert à compter de :
27 ans de service effectif pour les officiers de carrière ;
20 ans de service pour les officiers sous contrat ;
17 ans de service pour les militaires commissionnés ou non officiers.
Cet article ne visant que les fonctionnaires qui concourent à des missions de sécurité, de surveillance et de contrôle, les sapeurs-pompiers en sont exclus alors qu’ils devraient être éligibles compte tenu de la dangerosité et du fort enjeu de sécurité de leur métier.
Article 38. Catégories actives et transition
Cet article habilite le gouvernement à fixer par ordonnance les règles de transition en matière d’âge d’ouverture des droits à la retraite, d’âge d’équilibre et de limite d’âge applicable aux fonctionnaires dont l’emploi est classé dans la catégorie active avant l’entrée en vigueur du système universel de retraite, y compris pour ceux qui concourent à des missions publiques de sécurité, de surveillance et de contrôle. Le gouvernement a écarté ce scénario d’un report conséquent de la réforme. Il a néanmoins fait le choix d’une adaptation sur une période 15 ans ce qui est une transition assez longue qui ne nous satisfait pas totalement. Les assurés concernés par les nouveaux âges d’ouverture de droits sont ceux nés à partir de 1980 ou 1985.
Article 39. Définition des périodes et règles de transition pour régimes spéciaux par voie d’ordonnances
Cet article habilite le gouvernement à fixer par ordonnance les règles de transition en matière d’âge de départ à la retraite et d’âge d’équilibre applicables aux anciens assurés des régimes spéciaux. Cette dernière prévoira également les modalités de financement de ces dérogations par une cotisation supplémentaire dont seront redevables les employés concernés. Elle précisera également les modalités de leur articulation avec les dispositifs de pénibilité de droit commun. Cette convergence qui devrait s’étirer sur une durée de 15 ans et nécessaire pour prendre de compte l’hétérogénéité de ces régimes. L’article est muet sur ce point mais des marges de manœuvres financières devront être trouver pour compenser les personnes pour qui un départ plus tard à la retraite constitue « une rupture implicite du contrat de travail ».
Article 40. Garantie d’une retraite minimale
Un minimum de pension sera accordée à compter de l’âge d’équilibre, qui doit garantir aux assurés ayant effectué une carrière complète une retraite nette égale à 85 % du Smic net par l’attribution de points. Cet article constitue une avancée au regard de la situation actuelle. La règle des 85% du SMIC était certes annoncée dans les textes depuis 2003 mais aucune réforme depuis lors ne s’était donnée les moyens réels de parvenir à cet objectif.
Une carrière complète est nécessaire pour bénéficier de l‘intégralité de ce minimum. Cette carrière complète est fixée à 516 mois soit 43 ans pour la génération 1975 et évoluera comme l’âge d’équilibre. Si l’assuré n’a pas sa carrière complète, le minimum de pension est proratisé en fonction de la durée acquise. Encore, une fois ce dispositif s’articule non pas autour de l’âge légal de départ à la retraite (62 ans) mais de l’âge d’équilibre ce qui contribue à rendre toujours plus fictif l’âge légal e départ à la retraite dans le futur système.
Des dispositions spécifiques sont prévues pour les travailleurs indépendants, les non-salariés agricoles et les exploitants agricoles.
Article 41. Retraite minimale dès 2022
Le minimum de pension est porté à 1 000 euros net pour les assurés ayant une carrière complète (62 ans et 42 ans de cotisations) dès 2022 - ce qui profitera essentiellement aux travailleurs indépendants et aux exploitants agricoles, grâce à un complément différentiel. L’article prévoit ensuite une montée en charge progressive pour porter le minimum de pension à 85 % du Smic net en 2025, à partir de 62 ans et de 42 années de cotisations.
Dans sa philosophie le gouvernement entendait donc garantir un montant de pension supérieur au seuil du minimum vieillesse pour les assurés ayant cotisé sur la base d’un faible niveau de rémunération. Le système de retraite actuel permet déjà de garantir une pension contributive supérieure au minimum vieillesse, qui est indépendant de la carrière et relève d’une logique d’aide sociale. Cependant, les récentes sur-revalorisations du minimum vieillesse (ASPA) remettaient en cause ce principe.
Article 42. Prise en compte interruption de carrière
L’article 42 instaure une attribution de points sans contrepartie de cotisation pour les périodes de congés maladie et congés maternité, de chômage. Ces points acquis au titre de cette solidarité seront financés spécifiquement et auront strictement la même valeur que les points acquis au titre de l’activité.
L’article 42 décante par la suite les situations donnant lieu à l’attribution de points gratuits par la solidarité nationale (impôts et taxe) :
Les périodes de maladie et de congés maternité devaient être systématiquement compensées par le système de retraite via l’attribution de points sur la base de calcul reposant sur l’intégralité du salaire de l’intéressé au moment de l’interruption d’activité. Cette disposition traduit cette demande et constitue une avancée par rapport au système actuel qui est fondé sur la validation de trimestres mais était pénalisante compte tenus des droits qui étaient portés au compte.
En matière d’invalidité, l’avant projet de loi maintient le régime actuel. Le salaire de référence pour le calcul de la pension d’invalidité reste le salaire moyen des dix meilleures années. C’est une déception quand on sait que la France est l’un des seuls pays en Europe qui fait référence à une durée aussi longue pour le calcul des droits retraites des personnes invalides. De plus le risque de pauvreté est supérieur pour les handicapés en France.
En matière de chômage, ces périodes donneront lieu à l’acquisition de points sur la base des indemnités versées à ces assurés au titre de ces périodes, notamment l’allocation de retour à l’emploi (ARE) et, dans l’attente des conclusions des travaux en cours sur le revenu universel d’activité, l’allocation spécifique de solidarité (ASS). Compte tenu de la faiblesse du niveau de l’Allocation de Retour à l’Emploi (ARE), l’octroi de points sur cette base risque de ne pas permettre de valider des beaucoup de points. Il aurait été préférable de valider des droits à hauteur de 80 % du dernier salaire antérieur comme en Suède. Par ailleurs, il est à relever que seules les périodes de chômage indemnisées seront prises en compte. A l’heure actuelle ces périodes sont, sous certaines conditions, prises en compte (la prise en compte des périodes de chômage se fait en 2 temps : une "première période qu’elle soit continue ou non, est prise en compte dans la limite d’un an et demi, dans la limite de 6 trimestres; puis chaque période ultérieure est prise en compte si elle est successive à 1 période indemnisée, dans la limite d’1 an, ou 5 ans si l'intéressé a au moins 55 ans en fin de droits et a été affilié au moins 20 ans.).
Article 43. Droits retraite pour les aidants
L’article 43 créée un dispositif unique de garantie de droits à retraite pour les aidants. Ce dispositif permet d’acquérir un minimum de points au titre des périodes pendant lesquelles un assuré s’occupe d’une personne handicapée ou d’une personne âgée en perte d’autonomie ou d’une personne malade. L’exposé des motifs mentionne que cette attribution de points sera équivalente à celle d’une personne travaillant au Smic. Le niveau de compensation sera prévu par décret. C’est un début de reconnaissance des activités à forte valeur sociale.
Article 44. Majoration pour enfants
L’article 44 instaure un dispositif unique de majoration en points (5 % selon l’exposé des motifs). Cette majoration dès le premier enfant et attribuée automatiquement à la mère. Les parents auront toutefois la possibilité de se partager cette majoration selon certaines modalités. Cette majoration ne sera attribuée, lors du calcul de la retraite, que si l’assuré a acquis un nombre minimum de points défini par décret. Une majoration supplémentaire définie par décret (1 %) sera attribuée à chaque parent d’au moins trois enfants. Les parents pourront attribuer d’un commun accord cette majoration totale de 2 % à un bénéficiaire unique.
Ce texte marque donc une avancée en ce qu’il adapte notre système aux réalités sociologiques de notre époque. Il ouvre des droits à beaucoup plus de familles qui ne bénéficient d’aucune majoration actuellement (familles de 1 ou 2 enfants). Aujourd’hui, plus de 80 % des droits familiaux sont concentrés sur les familles nombreuses alors que seuls 40 % des retraités ont eu trois enfants ou plus. En revanche, la réforme ayant se faisant à moyens constants pour les droits familiaux, les familles nombreuses de 3 enfants vont être légèrement pénalisées puisque chaque parent recevaient 10% de bonifications de pension dans l’ancien systèmes, ils ne recevront désormais que 8,5% chacun.
Article 45. Points accordés pour le périodes d’interruption de carrière
La perspective du passage à un systèmes universel amène à revisiter certains dispositifs liés aux interruptions ou réductions d’activité des assurés au titre de l’éducation d’enfants dans les premières années suivant la naissance de ce dernier. Des points seront attribués au titre des périodes de perception de l’allocation de base de la prestation d’accueil du jeune enfant ou de la prestation partagée d’éducation de l’enfant, dans la limite d’un nombre de points acquis au cours d’une année fixée par décret. Des droits seront également ouverts pour les bénéficiaires du complément familial jusqu’aux six ans de l’enfant. Ce dispositif a vocation à se substituer à l’actuelle assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) et aux trimestres accordés au titre de l’enfant (majoration de durée d’assurance (MDA) pour congé parental et validation gratuite des périodes d’interruption d’activité dans la fonction publique). Pour rappel, dans le système actuel, la majoration de durée d’assurance (MDA) est parfois inutile aux femmes qui ont le nombre de trimestres requis (durée s’assurance) pour bénéficier du taux plein sans les trimestres de MDA. Au-delà du fait que ce dispositif n’était pas transposable dans un système en points, ce caractère « inutile » de la MDA aurait pris une importance croissante avec l’augmentation du taux d’activité des femmes dans les années à venir.
Le texte prévoit une fusion des dispositifs actuels de majoration de durée d’assurance (MDA) et d’allocation vieillesse des parents au foyer (AVPF). Par conséquent, un équivalent du mécanisme de MDA est maintenu contrairement à ce que prétendent certains articles de presse ou des organisation syndicales opposées à la réforme. En revanche, il est vrai que ce nouveau droit est conditionné à la réalité d’une interruption de carrière. On peut aussi regretter que les points attribués à hauteur de 60 % du SMIC soit nettement insuffisants pour compenser les pertes de salaires des femmes qui décident de travailler pour éduquer leurs enfants.
Article 46. Pension de réversion
Les conditions d’attribution de la réversion (âge, ressources, durée de mariage) et le taux de réversion diffèrent selon les régimes des secteurs privé et public, la perspective du passage à un système universel conduisait donc à unifier les règles de réversion. La retraite de réversion sera attribuée à partir de l’âge de 55 ans et non soumise à condition de ressources. Un temps envisagé à 62 ans (rapport Delevoye) ce texte retient les 55 ans en vigueur dans les régimes complémentaires de salariés du privé.
Il n’y a pas de conditions de ressources pour bénéficier du droit à réversion. La somme des pensions est néanmoins prise en compte pour le calcul du montant de la réversion. Elle sera en effet de telle sorte que la retraite de réversion majorée de la retraite de droit direct du conjoint survivant corresponde à 70 % des points acquis de retraite par le couple. Cette disposition obéit à une considération financière (limiter les dépenses liées à la réversion compte tenu de l’ouverture faite dès 55 ans et sans condition de ressources) et à une volonté de recentrer la réversion sur sa fonction d’assurance veuvage. Cette approche qui demeure moins favorable que le système proposé trouve donc une double explication qu’il est délicat de combattre si l’on veut préserver une ouverture dès 55 ans et l’absence de condition de ressources.
Cette pension de réversion sera attribuée sous condition de durée de mariage et de non-remariage après le décès. Une condition de durée de mariage de deux ans est fixée alors qu’actuellement elle n’existait pas dans le régime général et dans le régime de retraite complémentaire des salariés (4 ans de mariage pour les fonctionnaires) mais cette condition est levée si des enfants sont issus du mariage. Ce dispositif, même s’il n’est pas le plus favorable peut apparaître juste pour limiter les choix opportunistes. Enfin, une ordonnance précisera les modalités de garantie des droits pour les conjoints divorcés.
Article 47. Instauration d’une garantie minimale de points pour les jeunes actifs
Cet article prévoit une attribution de points retraite au titre de la solidarité nationale pour :
• les périodes d’apprentissages sous réserve de remplir une condition d’âge et de ressources ;
• les périodes de service civique, sous réserve d’une durée minimale ;
• les sportifs de haut niveau sous réserve de remplir une condition d’âge et de ressources. Ces sportifs sont affiliés au régime général.
Le texte renvoyant à un décret il est difficile à ce stade d’apprécier la hauteur des droits attribués à ces publics.
Article 48. Rachat de point
Un dispositif de rachat de points à tarif réduit au titre des années d’études supérieure et des périodes de stage ayant donné lieu à gratification est instauré. Aujourd’hui, le rachat de trimestres au titre d’années d’études est un dispositif peu accessible financièrement. Le texte renvoyant à un décret il est difficile à ce stade d’apprécier la réduction de tarif pour le rachat des points dans le système universel de retraite.
Article 49. Création de la Caisse nationale de retraite universelle
Les modalités d’organisation du système universel de retraite consistent en la création d’un établissement de tête, crée au 1er janvier 2020, et d’un réseau territorialisé unifié. L’article 49 crée donc un 43 éme régime de retraite aux prérogatives étendues en matière de gestion des autres caisses de retraite.
La Caisse nationale de retraite universelle sera administrée par un conseil d’administration paritaire composé des organisations syndicales représentatives et des organisations professionnelles représentatives représentant également les travailleurs indépendants, les professions libérales et les employeurs publics. La composition du Conseil d’administration est conforme à ce que l’on pouvait imaginer à savoir l'intégration des organisations syndicales de la fonction publique et des professions libérales ainsi que la présence de l’Etat employeur.
On quitte donc le paritarisme pur de la retraite complémentaire. La composition de la CNRU laisse présage davantage d’un mode de gestion tripartite. L'Etat ne pouvait pas se désengager de la gestion d’une dépense représentant 14 % du PIB. La concertation toujours en cours doit parvenir à la mise en place d’une gestion partagée en évitant une gouvernance exclusivement réservée à l’Etat. Il reste encore beaucoup d'incertitudes sur la marge de manœuvre du conseil d'administration face aux décisions qui seront prises par le directeur général de la caisse.
Article 50. Phase de préfiguration
La caisse nationale de retraite universelle pilotera les chantiers (campagnes de fiabilisation des carrières, projets informatiques, réorganisation du réseau etc.) contenus dans le schéma de transformation qui sera élaboré après la publication de la loi, le 30 juin 2021 au plus tard. Elle absorbe le GIP Union Retraite.
Le schéma de transformation devait certes préparer le passage progressif à un système universel mais il est étonnant de constater qu’il se traduit par une mise sous tutelle immédiate de l’ensemble des organismes de retraite des salariés du secteur privé, agricoles et des indépendants. Le gouvernement choisit de presser la refonte administrative du risque vieillesse avant même l’entrée en vigueur du système universel. La Caisse national de retraite universel disposera très rapidement d’un droit de regard sur le pilotage technique et financier des régimes. Dans sa rédaction cet article préfigure une transition brutale qui adviendra dès 2022 (quand le rapport Delevoye tablait sur 2025) pour les organismes qui gèrent la retraite de base et complémentaire mais surtout pour leurs personnels. Ces derniers auront l’obligation de transmettre les délibérations de leurs gouvernances et se voir opposé l’exercice d’un droit d’opposition de la tutelle étatique ; notamment lorsque la gestion de ces caisses n’est pas en adéquation avec la trajectoire prévue par la Caisse nationale de retraite universelle. De même, le directeur général de l’établissement pourrait alerter la tutelle en cas de décisions non conformes au schéma de transformation.
Le gouvernement peut, par voie d’ordonnance, prendre les mesures pour l’intégration des caisses de retraite et des institutions complémentaire, et organiser la gestion au niveau local des risques d’accident du travail et de maladies professionnelles au sein du régime général.
La suppression des CARSAT est donc programmée dès le 1er janvier 2022 pour devenir des établissements territoriaux - sans personnalité morale – qui regrouperont les différents organismes retraites (autres régimes et retraite complémentaire).
C'est également une dépossession des compétences des partenaires sociaux gestionnaires de l'AGIRC-ARRCO et des accords qu’ils ont signés dans le cadre de l’ANI du 10 mai 2019. Cette accélération injustifiée du placement de l'ensemble des régimes de retraite sous l’égide de l’Etat aura des conséquences sur les lois de finances de sécurité sociale (LFSS) qui dès 2021 contiendront dans leur champs les régimes complémentaires .
Enfin, on peut s’étonner que les régimes de base comme le régime complémentaire des salariés du privés soient les “cobayes” des restructurations organisationnelles que l’Etat est incapable de mener sur son champs puisque ce dernier prévoit une période 15 ans pour la transition de ses propres caisses de retraite.
Article 51. Professionnels libéraux
Cet article prévoit la création par ordonnance d’un Conseil de la protection sociale des professionnels libéraux Ce conseil sera compétent pour définir les prestations en espèces et d’action sociale pouvant être attribuées aux professionnels libéraux en cas d’invalidité, de décès, et le cas échéant de maladie, et en matière de retraite supplémentaire obligatoire pour ces assurés. En outre, un conseil de la protection sociale des professions libérales (CPSPL) sera créé, afin d’assurer la représentation des professionnels libéraux au sein du système universel et de favoriser l’exercice mutualisé au sein des professions libérales des compétences en matière d’invalidité-décès.
Article 52. Artistes-auteurs
Un organisme agréé, issu de la fusion de l’Agessa et de la MDA, continuera d’exercer certaines missions d’affiliation des artistes-auteurs au régime général, d’action sociale et d’information. Un projet d'ordonnance définira les modalités spécifiques de délégation de la gestion du système universel de retraite à la caisse de retraite complémentaire des artistes auteur (IRCEC)
Article 54. Articulation entre la CNRU et les organismes
La CNRU pourra accorder une délégation de gestion aux organismes gérant un régime de retraite légalement obligatoire. Les modalités de cette délégation de gestion seront définies et ajustables dans le cadre de la conclusion de conventions entre les organismes gestionnaires et la caisse nationale. Comme évoqué à l’article 50, les administrateurs et personnels des caisses de retraite pourraient souhaiter que cette délégation de gestion n’intervienne pas avant 2025 et la mise en place du régime universel conformément au rapport Delevoye.
Article 55. Pilotage financier
Cet article fixe le cadre du pilotage financier du futur système universel de retraite universel. Tous les cinq ans, sur la base d’un rapport du comité d’expertise indépendant, le conseil d’administration de la CNRU propose une trajectoire financière du système de retraite sur un horizon de quarante ans. Il doit toutefois dans ce cadre respecter une "règle d’or" imposant l’équilibre du système sur la première période de cinq ans.
Le Conseil administration et par extension les partenaires sociaux ont la main sur les paramètres suivants pour mettre en oeuvre la trajectoire financière des retraites:
-les modalités d’indexation des retraites
-l’évolution de l’âge légal et de l’âge d’équilibre
-la revalorisation valeur d’acquisition/ de service du point
-les taux de cotisation
-les produits financiers des réserves
Si les leviers de stabilisation du régime sont apparemment aux mains du Conseil d’administration de la CNRU, celui-ci agit dans un environnement fortement contraint par le législateur En effet, si le conseil d’administration ne parvient pas à trouver un consensus (avant le 30 juin de chaque année) ou si les délibérations ne respectent pas la trajectoire financière (apurement de la dette et équilibre financier) les paramètres sont fixés par décret.
L’Etat est donc susceptible de reprendre la main à tout moment. Néanmoins ce décret devra lui aussi respecter les mêmes garanties d’équilibres que celles posées au Conseil d’administration.
Ce modèle pilotage présente de grandes similitudes avec les règles de pilotages stratégiques et tactiques qui ont été décidés en 2017 pour le régime unifié de l’AGIRC ARRCO. Le futur système de retraite universel fixe également des horizons de pilotage de court, moyen et long terme.
Ce pilotage « stratégique » (sur 5 ans) devait trouver son relais dans le pilotage tactique (annuel), assurant la réactivité du dispositif dès lors qu’un écart avec les prévisions était constaté par le Comité d’expert indépendant.
Le Conseil d’administration peut proposer des modifications législatives concernant les conditions d’ouverture des droits (âge légal, dispositifs de départs anticipés) ainsi qu’aux dispositifs de solidarité (périodes assimilées, droits familiaux, minimum de retraite, etc.). Cette disposition peut présenter un motif de satisfaction pour les partenaires sociaux siégeant dans le Conseil d’administration. Encore faudra-t-il que le gouvernement fasse connaître de façon argumentée, les suites qu’il entend donner aux propositions du conseil d’administration pour renforcer cette procédure.
Cette gouvernance ne présage pas de modifications législatives. Dans le cadre des lois financières, le Gouvernement pourra toujours présenter au Parlement les modifications ayant trait aux conditions d’ouverture des droits (âge légal, dispositifs de départs anticipés) ainsi qu’aux dispositifs de solidarité (périodes assimilées, droits familiaux, minimum de retraite, etc.). L’appréciation de ces éléments, compte tenu de leur nature, relèvera de la loi et du pouvoir réglementaire. Toutefois, sur ces sujets, le Conseil d’administration disposera d’une capacité à donner son avis sur les choix du Gouvernement.
A noter que le Conseil d’administration n’a pas directement la main sur les dispositifs de solidarité. L’Etat sera gestionnaire du fonds de solidarité universel vieillesse, ce fonds étant alimenté uniquement par des impôts, taxes et autres transferts. venant du budget de l’Etat.
Article 56. Création du comité d’expertise indépendants
Le comité reprendra les missions du comité de suivi des retraites, qui sera remplacé à compter de l’installation du comité d’expertise indépendant. Son rôle sera articulé avec le Conseil d’orientation des retraites, qui est maintenu avec sa composition actuelle associant experts, partenaires sociaux et parlementaires, mais ne donne plus qu’un avis sur les travaux et propositions du comité d’expertise.
De par l’ampleur des missions de ce comité d’expertise indépendants, on en déduit que le COR se maintient mais avec des missions qui seront considérablement amoindries. Il ne formulera désormais que des recommandations ou propositions en matière de retraite, sur la base des rapports produits par le Comité d’expertise. On en déduit également que le COR ne conduira plus des groupes de travail et des réunions mensuels sur une thématique de notre système de retraite. Les rapports annuels et quinquennaux seront désormais construits et élaborés par le comité d’expertise. Or les partenaires sociaux ne sont pas représentés au sein du Comité d’expertise dont la composition par ailleurs est très réduite. Les partenaires sociaux n’auront plus leur place au sein de l’instance chargée de suivre les évolutions à moyen, long terme du système de retraites.
Article 56 bis. Conférence sur le financement ou équilibre du système en 2027
Dans sa rédaction initiale, l'article 56 bis prévoyait de mettre en place en 2022 un âge d'équilibre, applicable par génération et qui ferait partie des paramètres du système universel de retraite.
La réforme aurait donc été beaucoup plus rapide, puisqu'elle se mettant en place dès 2022 pour les générations nées à partir de 1960. Le retrait gouvernemental est un vrai retrait, puisque le Premier ministre a renoncé à la détermination ex ante de cet âge d'équilibre. Cet article prévoyait de le porter de 62 à 64 ans entre 2022 et 2027.
Dans sa nouvelle rédaction, les partenaires sociaux vont travailler ensemble dans le cadre de la conférence de financement pour déterminer de quelle manière assurer l'équilibre (déficit de 12 milliards d’euros cumulé à horizon 2027).
A noter que même supprimé, le concept d'âge d'équilibre demeure central dans le projet de loi. L’âge d’équilibre demeure un paramètre à définir dans le système de retraite universel. Par ailleurs, certains dispositifs sont articulés autour de cet âge alors qu’ils le sont autour de l’âge légal actuellement (Pension minimale de retraite, cumul emploi retraite)
Article 57. Intégration financière
L’article 57 prévoit que la future Caisse nationale de retraite universel (CNRU) bénéficiera des recettes des cotisations, de versements de fonds de solidarité et des produits financiers du fonds de réserve. La CNRU pilotera l’équilibre financier des régimes de base (CNAV, MSA, CNAVPL, CNRACL) à compter de 2022 puis, après 2025, de l’ensemble des régimes.
Si l’on peut comprendre l’idée que certains régimes avancent plus vite que d’autres dans le chantier de l’intégration financière., on peut s’étonner du choix prématuré de la date de 2022 pour les régimes du secteur privé qui perdront dès cette date leurs autonomie financière et gestion.
Article 58 : création du Fonds de solidarité vieillesse universel (FSVu)
Les dépenses de solidarité du système universel de retraite sont gérées par le Fonds de solidarité vieillesse universel à compter du 1er janvier 2022. Ses ressources sont constituées de l’ensemble des recettes hors cotisations des régimes vieillesse actuels. Il est doté d’un conseil de surveillance.
On peut encore une fois s’interroge fortement sur le nombre très important de dispositifs de solidarité qui vont être à la charge du FSVu
1/ l’attribution de points au titre des périodes d’interruption d’activité subies (chômage, maladie, invalidité, etc.),
2/ les minima de retraite,
3/ les dispositifs de départs anticipés de droit commun (carrières longues, compte professionnel de prévention, etc.),
4/ les droits familiaux par l’intermédiaire d’un transfert de la branche famille.
Dans le même temps, le FSVu continuera de recevoir la vingtaine de ressources affectées au financement du FSV actuels et qui ne garantissent pas son équilibre alors que dans le même temps ces missions vont s’étendre. Il faudra trouver très vite une nouvelle source de financement assise sur une fiscalité à assiette plus large pour venir assurer l’intégralité des futures dépenses de solidarité du FSUv.
Article 59 . Création du fonds de réserves universel
L’article 59 instaure un établissement administratif doté de la personnalité morale et financière chargé de gérer les réserves du système universel est mis en place au 1er janvier 2022, date à laquelle l’ensemble des droits, biens, obligations, dettes, créances et titre patrimoniaux, y compris les contrats de travail de leurs agents, du Fonds de réserves des retraites (FRR) lui seront transférés. Il est constitué d’un conseil de surveillance et d’un directoire.
Selon le gouvernement, le recours à l’endettement pour financer les besoins de financement du système de retraite universel étant de nature à altérer la confiance des citoyens dans le système de retraite selon le gouvernement. Pour faire face aux retournements conjoncturels pour aux chocs démographiques, le système universel privilégie la constitution de réserves à l’instar de ce qui se pratique actuellement à l’AGIRC ARRCO. A ce stade le texte ne prévoit pas de mobiliser les réserves des régimes actuels pour alimenter le FRU.
L’avant-projet de loi prévoit que des réserves seront constituées dans le cadre du SUR à partir de l’actuel Fonds de réserves des retraites (37 milliards d’euros en 2017). Les excédents du système universel de retraite pourront aussi être versés au Fonds de réserve Universel sur décision de la Caisse nationale de retraite universel. Celle-ci pourra mobiliser les produits des placements du Fonds de réserve universel pour financer le système universel de retraite.
L’avant-projet de loi prévoit donc de dissoudre le Fonds de Réserve des Retraites à compter de 2021. A un moment où certains syndicats souhaitent justement le mobiliser pour trouver l’équilibre en 2027. Pas de doute que cette question épineuse sera à l’ordre du jour de la conférence sur le financement.
Article 60. Garantie des droits passés.
Le système universel de retraite garantira l’intégralité des droits constitués avant son entrée en vigueur pour l’ensemble des assurés qui en relèveront. Les périodes d’assurance (trimestres) et de majorations de pensions (bonifications) accordées dans les régimes antérieurs d’affiliation afin de compenser l’incidence sur leur vie professionnelle de la naissance ou de l'adoption d’un ou plusieurs enfants et de leur éducation sont prises en comptes. C’est une surprise, le gouvernement choisi donc la conversion des droits à l’italienne avec une conversion seulement en fin de carrière.
Article 61. Régimes complémentaires.
Le système universel de retraite intègrera l’ensemble des régimes de retraite obligatoires, de base ou complémentaires. L’affiliation des personnes nées à compter de 1975 à un régime de retraite complémentaire n’est donc plus nécessaire. Les personnes nées avant le 1er janvier 1975 resteront affiliées aux régimes complémentaires préexistants. Une ordonnance prévoira la répartition de ce taux de cotisations entre régimes de retraite de base et complémentaires.
Cette transition longue est une prise de risque au regard de l’objectif d’universalité du régime. Ce que certaines professions ont déjà obtenu en terme de dérogations est susceptible de se reproduire tout au long de ce différé de mise en œuvre de la réforme. Les navigants de l’aviation civile relèvent aujourd’hui d’un régime complémentaire particulier. Les modalités applicables à la retraite de ces personnels seront définies par ordonnance, afin de prévoir les adaptations nécessaires à leur situation particulière.
Article 62. Transitions/générations
Le gouvernement fait le choix d'une transition progressive, avec une mise en place graduelle du nouveau système. Ce type de transition permettra de lisser les changements réalisés. Cette réforme est finalement assez lointaine compte tenu d'une mise en œuvre différée. Elle s'appliquera pleinement à partir de la génération 2004 qui devrait partir à la retraite au plus tôt au milieu des années 2060. Une première étape importante sera l'arrivée à la retraite -vers 2037- de la génération 1975, qui verra sa pension calculée selon le nouveau système, mais avec une conversion des droits qui fera que le montant dépendra pour une large part des années cotisées avant 2025.
Une ordonnance aménagera ces générations pour les catégories partant actuellement plus tôt en retraite (fonctionnaires, magistrats et assurés des régimes spéciaux, militaires, Opéra national de Paris, les personnels navigants).
La CNRU sera mise en place dès le 1er décembre 2020. Sous réserve des transitions prévues en application de l’article 15, les assiettes et taux de cotisations du système universel de retraite entreront en vigueur au 1er janvier 2025 pour l’ensemble des assurés.
S’agissant des assurés nés à partir du 1er janvier 2004, pour lesquels le système universel de retraite entrera en vigueur au 1er janvier 2022, des périodes transitoires sont prévues concernant les règles relatives aux cotisations d’assurance vieillesse.
Article 63. Adaptation des textes existants.
L’article 63 habilite donc le gouvernement à prendre par ordonnances, en concertation avec les collectivités concernées, les mesures rendues nécessaires dans les départements et collectivités d’outre-mer où l’État est compétent en matière de retraite. L’unification des 42 régimes actuels de retraite légalement obligatoires, de base et complémentaires rend nécessaire des adaptations rédactionnelles dans un très grand nombre de textes.
Article 64. Ratifications d’ordonnance Pacte.
Cet article ratifie trois ordonnances relatives aux dispositifs de retraite supplémentaire.
L’ordonnance n° 2019-575 du 12 juin 2019 relative aux activités et à la surveillance des institutions de retraite professionnelle transpose la directive (UE) 2016/2341 dite "IORP II" prise sur le fondement de l’article 199 de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (loi Pacte) ;
L’ordonnance n° 2019-697 du 3 juillet 2019 relative aux régimes professionnels de retraite supplémentaire prise sur le fondement de l’article 197 de la loi Pacte ;
L’ordonnance n° 2019-766 du 24 juillet 2019 portant réforme de l’épargne retraite est prise sur le fondement de l’article 71 de la loi Pacte.
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